Loi infirmière : votée, mais toujours pas appliquée

Quand la reconnaissance reste bloquée dans les tiroirs administratifs

Le 27 juin 2025 devait rester une date historique pour la profession infirmière.

Ce jour-là, la loi infirmière était enfin votée. Pour la première fois, le rôle, les compétences et l’expertise des infirmières et infirmiers étaient clairement reconnus dans le marbre législatif.

Pour la Fédération CFTC Santé Sociaux, cette loi portait une promesse forte : celle d’un regard enfin juste sur un métier essentiel, pilier du système de santé et maillon indispensable du parcours de soins. Sur le terrain, l’espoir était bien réel. L’attente aussi.

Six mois plus tard, l’espoir s’essouffle et le constat est amer.

Une loi sans application : la promesse suspendue

La loi est promulguée, mais elle reste lettre morte.

Faute de décrets, d’arrêtés et de textes d’application, rien ne change concrètement pour les professionnels.

Sur le terrain :

  • l’accès direct aux soins infirmiers n’est toujours pas effectif ;
  • les prescriptions infirmières demeurent sans cadre officiel ;
  • les infirmiers en pratique avancée (IPA) continuent d’exercer dans un flou réglementaire préoccupant ;
  • les revalorisations et la reconnaissance salariale annoncées n’ont toujours pas vu le jour.

Autrement dit, la reconnaissance existe sur le papier, mais pas dans la réalité quotidienne des services.

Des professionnels toujours en première ligne

Pendant que l’administration temporise, les infirmières et infirmiers, eux, n’ont jamais cessé d’être là.

Chaque jour, ils compensent les manques du système, assurent la continuité des soins, soutiennent les patients et leurs familles, tiennent les équipes à bout de bras.

Fatigue chronique, surcharge de travail, pénurie de moyens : malgré tout, ils répondent présents. Avec professionnalisme. Avec humanité. Mais aussi avec une lassitude grandissante face à des engagements non tenus.

Être reconnus dans une loi sans pouvoir exercer pleinement les compétences qu’elle prévoit, c’est rester enfermés dans une attente administrative injustifiable.

Pour la Fédération CFTC Santé Sociaux : trop, c’est trop

Pour la Fédération CFTC Santé Sociaux, la situation actuelle ne peut plus perdurer.

Nous refusons que la loi infirmière devienne un simple symbole politique.

Nous refusons que les infirmières et infirmiers soient, une fois de plus, oubliés après les annonces.

Nous refusons que la reconnaissance législative reste sans effet concret sur les conditions de travail et la qualité des soins.

La CFTC exige :

  • la publication immédiate de l’ensemble des décrets et arrêtés d’application ;
  • la mise en œuvre réelle des nouvelles compétences prévues par la loi ;
  • une revalorisation effective du rôle infirmier dans le parcours de soins ;
  • le respect de la parole donnée aux professionnels de santé.

Infirmières et infirmiers : la clé du système de santé

Sans infirmières, pas de soins. Sans infirmiers, pas de santé publique.

Ils sont la première ligne, le lien humain, la présence continue auprès des patients. Ils incarnent une médecine de proximité, attentive et profondément humaine.

La Fédération CFTC Santé Sociaux continuera à porter leur voix, avec constance et détermination, pour que cette loi devienne enfin une réalité vécue, et non une promesse ajournée. 

Parce qu’un système de santé ne tient pas sur des textes, mais sur des femmes et des hommes reconnus, respectés et soutenus.

Points de vigilance : rester mobilisés pour que la loi vive enfin

À l’heure où la loi infirmière votée le 27 juin 2025 reste en suspens faute de textes d’application, la Fédération CFTC Santé Sociaux appelle à une vigilance accrue sur plusieurs volets essentiels pour que cette avancée législative se traduise réellement dans la pratique.

La reconnaissance des compétences et de l’autonomie accrues des infirmières et infirmiers ne doit pas rester lettre morte ou symbolique : elle exige des moyens, un cadre clair, et une transformation profonde des conditions d’exercice.

1. Moyen humain et organisationnel à la hauteur des responsabilités

La loi confère plus d’autonomie et de responsabilités aux infirmiers  (consultations, prescriptions, coordination des parcours) mais sans renforts d’effectifs ni amélioration des conditions de travail, ces évolutions risquent d’alourdir encore la charge mentale et organisationnelle des professionnels.

2. Reconnaissance salariale et statutaire équitable

Pour la Fédération CFTC Santé Sociaux, l’élargissement des missions doit s’accompagner d’une revalorisation salariale réelle et juste, adaptée à tous les statuts ; qu’il s’agisse des salariés des établissements, des IPA ou des infirmiers libéraux. Rien ne doit être laissé au hasard : la reconnaissance des responsabilités doit également se traduire par une reconnaissance financière.

3. Cadre réglementaire clair pour les prescriptions et l’accès direct

La mise en œuvre effective des prescriptions infirmières et de l’accès direct aux soins dépend entièrement des décrets et arrêtés encore attendus. Sans un cadre précis et concerté avec les acteurs de terrain, ces outils risquent de rester inopérants ou insuffisamment protecteurs pour les praticiens.

4. Formation initiale et continue renforcée

L’accroissement des compétences doit être accompagné d’une refonte ambitieuse de la formation ; notamment vers une universitarisation en sciences infirmières ; et de financements pour la formation continue. Sans cela, l’exercice de ces nouvelles compétences restera fragile et inégal selon les parcours professionnels.

5. Co-construction avec les acteurs de terrain

La CFTC insiste sur une approche participative, où les professionnels eux-mêmes sont associés à l’élaboration des textes et des outils d’application. Ce n’est qu’à cette condition que la loi pourra réellement répondre aux besoins de santé des territoires et aux attentes des patients.