La France rappelée à l’ordre sur les congés payés et la maladie

Le 18 juin 2025, la Commission européenne a adressé à la France une lettre de mise en demeure, pointant une non-conformité de notre droit national et sa jurisprudence, avec la directive européenne 2003/88/CE sur le temps de travail. En cause : l’absence de mécanisme permettant aux salariés de reporter leurs congés payés lorsqu’ils tombent malades pendant cette période. Une lacune que notre organisation dénonce depuis plusieurs années.

Un droit au repos et à la santé ignoré en France, pourtant mieux protégé par la jurisprudence européenne

Le droit européen, renforcé par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (arrêt du 21 juin 2012  de la CJUE), affirme que les congés payés doivent être dédiés au repos lié à l’activité professionnelle. Si un salarié est malade durant cette période, il ne bénéficie plus de ce temps de repos : il doit alors pouvoir basculer en arrêt maladie et reporter ses jours de congés. En France, ce principe reste absent du Code du travail. Toutefois, la Direction Générale du Travail préconise, pour être en conformité avec le droit européen et éviter tout contentieux inutile, de reporter les jours de congé payé coïncidant avec la période de l’arrêt maladie. En ce sens, la Cour d’appel de Versailles (arrêt du 18 juin 2022) a considéré que dès lors qu’il apparaît que durant ses congés payés, le salarié a fait l’objet d’un arrêt de travail pour maladie, il peut prétendre au report des jours de congé payé, les jours d’arrêt maladie ne pouvant pas s’imputer sur son solde de congés payés.

Une mise en demeure qui oblige la France à réagir

Depuis des années, un salarié qui tombait malade pendant ses vacances ne pouvait pas exiger le report de ses jours de congés, sauf clause spécifique dans sa convention collective. Une situation jugée injuste et non conforme au droit de l’Union européenne.

En effet, la Directive 2003/88/CE est pourtant claire : chaque salarié doit pouvoir bénéficier d’au moins quatre semaines de repos effectif par an. La jurisprudence de la Cour de justice de l’UE (notamment les arrêts Schultz-Hoff et Heimann) réaffirme que maladie et congé payé ne doivent pas se cumuler – et que les jours de repos doivent pouvoir être pris réellement, même en cas d’arrêt maladie.

Une réponse partielle du gouvernement, limitée à la fonction publique ?

Trois jours après la mise en demeure de la Commission européenne, le gouvernement a publié le décret du 21 juin 2025, pris en application des évolutions jurisprudentielles et européennes concernant le report et le paiement des congés pour les agents de la fonction publique.

Désormais, les agents publics empêchés de prendre leurs congés (notamment pour cause de maladie ou congé familial) pourront :

  • Reporter jusqu’à 20 jours ouvrés de congés sur une période de 15 mois après leur reprise ;
  • Recevoir une indemnité compensatrice en cas de rupture de contrat si des jours restent dus.

Et maintenant

Pour la Fédération CFTC Santé Sociaux, cette lettre de la Commission est un signal important. Elle souligne une inégalité structurelle dans l’accès au droit au repos. Le décret du 21 juin 2025 ne répondant pas à cette problématique, la France dispose de deux mois pour répondre et remédier aux manquements relevés par la Commission.

Nous appelons les pouvoirs publics à transposer pleinement les principes européens dans notre droit interne. Tous les salariés doivent pouvoir être protégés de la même manière. Il s’agit de garantir le droit au repos effectif, y compris en cas de maladie, et de permettre, le cas échéant, un report ou une indemnisation des congés non pris.

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